06.12.2023
Au sein d’ArianeGroup, différentes équipes travaillent de concert pour établir les trajectoires des missions d’Ariane tout en respectant les spécifications des clients et le domaine qualifié du lanceur. La trajectoire couvre l’ensemble de phases propulsées et orbitales du lanceur, jusqu’à l’atteinte de l’orbite visée pour la mise à poste de la charge utile. Au cœur de ce délicat équilibre depuis 35 ans, Stéphane Leboucher est responsable de l’habillage du programme de vol, un service chargé de « missioniser » le programme de vol qui gérera le lanceur jusqu’à sa destination finale.
Toutes ces missions ont donc pour objectif une orbite finale, définie par la nature de la charge utile (télécommunications, observation, science, exploration…). Du décollage sur le pas de tir au Centre spatial guyanais de Kourou, à la séparation de chaque étage, jusqu’à la livraison du satellite sur son orbite de destination, chacune de ces étapes participe à la trajectoire empruntée par le lanceur. Introduit dans le programme de vol qui supervise aussi bien la gestion lanceur que le pilotage, le guidage et la navigation, l’itinéraire comporte toutes les étapes par lesquelles le lanceur doit passer.
Les lanceurs Ariane sont qualifiés dès leur conception pour atteindre un domaine d’orbites définies avec une probabilité maximale. Un domaine qu’il est tout à fait possible d’étendre pour un client spécifique grâce aux performances démontrées du lanceur. Si la première contrainte est de s’arracher du sol et de traverser l’atmosphère, la masse et la finalité de la mission de la charge utile (son orbite) ont donc également une importance primordiale dans le calcul de la trajectoire.
« La trajectoire parfaite, c’est celle qui nous permet d’atteindre l’orbite visée pour la charge utile. » « L’objectif c’est de prendre en compte les demandes du client et les respecter au mieux compte tenu des capacités de notre lanceur. »
De ces deux facteurs découlent les paramètres qui déterminent la trajectoire qu’empruntera le lanceur. Allumage des moteurs, extinctions et séparation des étages, ouvertures de vannes pour contrôler la poussée et les attitudes du lanceur… Les fonctions principales du lanceur sont régies par un ensemble d’algorithmes invariables que les équipes d’ArianeGroup habillent de données spécifiques à la réalisation de la mission de la charge utile. C’est ce qu’on appelle la « missionisation » du programme de vol : cette activité dure entre 4 à 9 mois en fonction de la complexité de la demande et des compléments de qualification nécessaires à démontrer que le lanceur est apte à réaliser la mission.
« Ariane 6 sera encore plus adaptée qu’Ariane 5 pour maximiser les différents types d’orbites atteignables et l’emport de charges utiles. »
Lors des dernières missions d’Ariane 5, la précision en vol était 10 fois supérieure à la précision théorique. Injecter les satellites à seulement 5km de leur orbite optimale permet de réduire considérablement les efforts propulsifs qu’ils doivent fournir pour corriger leur orbite. Ils économisent ainsi leurs précieux ergols, nécessaires à leur vie opérationnelle et donc à l’accomplissement de leur mission. Le James Webb Space Telescope (JWST) de la NASA en est un magnifique exemple. La mise à poste du précieux télescope a été si précise qu’il n’a pas eu recours aux premières corrections d’orbites initialement prévues juste après sa séparation du lanceur sur son chemin pour rejoindre son point opérationnel, le point de Lagrange n°2, à 1,5 million de kilomètres de la Terre. Le succès de cette mission est tel que la durée de vie de JWST a théoriquement été doublée, une excellente nouvelle pour les scientifiques qui ont la chance d’utiliser les données qu’il a déjà commencé à récolter.
La possibilité d’allumer jusqu’à 4 reprises le moteur cryotechnique Vinci de son étage supérieur donnera à Ariane 6 de nouvelles opportunités en matière de trajectoires. Cela permettra de libérer des charges utiles sur des orbites différentes mais aussi de limiter les débris en orbite en assurant la désorbitation de l’étage supérieur en le plaçant sur une trajectoire plongeante pour qu’il se désintègre dans les couches denses de l’atmosphère. Cette fonctionnalité implique des calculs de trajectoires plus complexes mais dont les principes restent les mêmes.